Nous sommes bénévoles dans une association et nous avons pour habitude de marauder toute l’année la nuit du mardi au mercredi avec un médecin. Nous rencontrons les gens de la rue et leur offrons soupes, sandwichs, vêtements, soins sur place et surtout réconfort. Nous avons nos habitués, ceux qui nous attendent pour nous raconter leur histoire, différente d’un mardi sur l’autre, mais peu importe, nous sommes là pour les écouter. Un soir, en roulant doucement avec l’ambulance, notre regard est attiré par une forme sous un porche, à Issy-les-Moulineaux, près d’une boutique de téléphonie. Le mot d’ordre est de s’arrêter et d’aller voir. Nous découvrons un corps sous une couverture avec une bouteille à moitié vide à côté.
Doucement, d’abord, nous demandons si la forme a besoin d’aide. Alors nous entendons « foutez le camp, laissez-moi pioncer ». Nous n’insistons pas et repartons.
Le mardi suivant, nous revenons sur les lieux : même scénario, mêmes injures. Mais nous persistons et pendant six mois environ, nous revenons à la charge. Rien n’y fait. Nous ne savions même pas si elle était grande ou petite.
Puis un soir, la forme se lève et demande s’il y a un médecin parmi nous. Alors, ça y est le contact est fait. C’est une femme sans âge, elle se plaint de douleurs au thorax. Le médecin lui demande de monter dans l’ambulance afin de pouvoir l’examiner, elle refuse mais à force de persuasion accepte et nous avons tendu des draps par discrétion. Elle s’est légèrement dévêtue : un « magnifique » zona intercostal. C’est une infection virale, qui fait très mal. Médicaments adaptés à son zona donnés. Nous lui offrons aussi une soupe qu’elle accepte non pas pour son plaisir mais pour nous faire plaisir.
Le mardi suivant nous revenons et toute guillerette, elle se lève et nous dit rayonnante : « je suis guérie ».
Le médecin n’en croit pas ses yeux : un zona ne se guérit qu’au bout de plusieurs semaines. Elle nous explique alors qu’elle a écrasé les pilules et a étendu la poudre sur son thorax.
Guérison rare et exceptionnelle. C’était miraculeux. Elle a accepté une soupe, toujours pour nous faire plaisir. Les services sociaux la prennent en charge et la relogent dans un petit deux pièces. On considère que c’était un beau résultat. Si cela pouvait être le cas de toutes les personnes sans abri, ce serait merveilleux !
Témoignage rapporté par Daniel – bénévole
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